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Berlin, Kyoto, La Haye, New Delhi, Buenos Aires, Poznań, Doha, Glasgow ou bien encore Paris, chaque année depuis 1995, une ville du monde accueille la conférence des Parties.

La Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques est créée en 1992 lors du troisième sommet de la terre à Rio de Janeiro, invitant les 197 pays et l’Union Européenne à se réunir tous les ans lors des COP, en présence d’ONG, d’entreprises, de syndicats, de peuples autochtones, mais aussi de scientifiques.

Parmi les dates marquantes, on retiendra bien sûr 1995 avec la COP1 à Berlin où près de 130 délégués de différents pays entament les premières discussions afin de parvenir dans un futur proche à réduire les émissions de GES. La COP3 à Kyoto aboutit au fameux Protocole de Kyoto, obligeant, à compter de février 2005, les pays développés à réduire leurs émissions de 5% durant la période de 2008 à 2012 par rapport à 1990. Bien qu’insuffisant, cette COP fut rétrospectivement considérée comme un succès, en comparaison à la COP15 de Copenhague qui ne parvint pas à renégocier à la hausse les objectifs quantitatifs du protocole de Kyoto.

Adopté lors de la COP21, le 12 décembre 2015, l’Accord de Paris, assigne, 43 ans après le premier sommet de la terre à Stockholm – point de départ des négociations concernant le climat et l’environnement – un cadre juridique contraignant les pays à maintenir le réchauffement climatique sous la limite des 2 degrés, voire 1, 5 degrés par rapport à l’ère préindustrielle.

Bien que tardive, une étape majeure venait d’être franchie et aurait pu laisser penser que les COP suivantes s’inscriraient définitivement dans cette dynamique pour enfin traduire l’Accord de Paris en actions fortes et concrètes à brève échéance. Si les COP 22 (Marrakech), 23 (Bonn ), 24 (Katowice), 25 (Madrid), 26 (Glasgow) ont bien sûr apporté leurs lots d’avancées, certains points structurants de mise en oeuvre, tels qu’un engagement mondial à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 ou le versement des 100 milliards de dollars que les pays développés se sont engagés à mobiliser chaque année pour aider les pays du sud à lutter contre le réchauffement, tardent toujours à se concrétiser alors que chaque dixième de degré compte.

A tel point qu’après l’échec de Glasgow et les larmes de son président Alok Sharma s’excusant pour le Pacte de Glasgow décevant, un certain nombre de voix en viennent à remettre en cause la pertinence de ces rendez-vous annuels sous leur forme actuelle. Greta Thunberg annonçait ainsi qu’elle ne se rendrait pas à Charm el-Cheikh : « une opportunité pour les dirigeants […] d’obtenir de l’attention pour toutes sortes de greenwashing ou d’opérations de communication pour prétendre agir contre la crise climatique », tandis que António Guterres, le secrétaire général de l’ONU n’était guère plus clément en déclarant une fois de plus que « Nous nous dirigeons vers une catastrophe mondiale. Nous avons besoin d’action climatique sur tous les fronts et nous en avons besoin maintenant ».

C’est donc dans ce contexte que se déroulait du 6 au 20 novembre dernier, sur les bords de la mer Rouge, la COP 27 à Charm el-Cheikh. 4ème pays d’Afrique à accueillir la grand-messe du climat, où les négociations ont principalement tourné  autour de la finance, de la gestion des conséquences du changement climatique et des nouvelles ambitions de réduction des émissions. Avec 39 heures de retard, on retiendra principalement de la déclaration finale, la création d’un fonds d’aide pour les pertes et dommages pour les pays vulnérables durement touchés par les catastrophes climatiques et celle d’un « comité de transition » chargé de formuler des recommandations sur la manière de rendre opérationnels les nouveaux mécanismes de financement lors de la COP28 qui se tiendra en 2023 à Dubaï. Alors que le temps tourne, espérons que ce ne soit pas d’énièmes bonnes intentions sans lendemain.

Au regard des rapports et alertes réitérées depuis des dizaines d’années par les scientifiques, le bilan des COP climat apparaît donc quelque peu poussif. Quid de celui des COP biodiversité ?

Bien moins médiatisée que les COP climat, la Convention des Nations unies sur la biodiversité fut également créée lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro, en même temps que la convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD). Soit trois conventions soeurs pour trois défis systémiques et existentiels pour l’humanité. Nous consommons chaque année 1, 7 planète et 6 des 9 limites planétaires ont déjà été franchies. Qu’il s’agisse de la pollinisation, des 35 000 plantes que l’homme utilise pour la médecine, pour se nourrir, pour ses matériaux, ou bien encore des forêts qui constituent des puits carbone naturels, l’humanité dépend, selon l’IPBES, de 50 000 espèces sauvages pour vivre. Les services rendus par les écosystèmes représentent 40% de l’économie mondiale.

Tandis qu’il y a une seule espèce humaine sur terre, la France abrite à elle seule 10% des espèces recensées dans le monde, soit 18 782 espèces de plantes à fleurs, 4 390 espèces de lichens, 10 926 espèces de champignons, 435 espèces de mammifères, 180 espèces d’amphibiens, 3 621 espèces de mousses, 418 espèces de reptiles, 1 766 espèces d’oiseaux, 10 019 espèces de crustacés. Comme le rappelle la fresque du Muséum national d’Histoire naturelle, il est temps que “l’homme se réconcilie avec la nature en permettant le fonctionnement harmonieux de l’un et de l’autre, dans un intérêt commun”.

Trois semaines après l’Egypte et après que plusieurs personnalités clés de l’accord de Paris, dont Laurent Fabius, aient appelés à un accord d’une ampleur similaire, rappelant que les objectifs climatiques ne peuvent être atteints sans endiguer la destruction de la nature, Montréal hébergeait du 7 au 19 décembre 2022, la COP15 sur la biodiversité. Comme pour compenser le bilan en demi-teinte de Charm el-Cheikh, la COP15 s’est conclue sur un nouveau plan stratégique pour la période 2022-2030, au travers de l’adoption du « Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal ». Ce dernier prend le relais du Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020, adopté par les parties lors de la COP10 à Nagoya et qui vise, notamment via une mobilisation de 200 Md$/ an, à :

  • restaurer au moins 30 % des aires dégradées d’ici à 2030,

  • protéger 30 % des terres, des zones côtières et des eaux intérieures de la planète d’ici la fin de la décennie,

  • réduire la perte des zones de forte importance pour la biodiversité à « proche de zéro » d’ici à 2030.

S’il n’y a pas de climat stable sans biodiversité, il en va de même pour les parties prenantes. Les COP seules ne peuvent pas tout. Si elles sont un lieu incontournable de concertation globale, les États, institutions financières, entreprises, ONG et la société civile doivent chacun prendre leurs responsabilités et faire leur part.

Pour les entreprises en particulier, leur capacité à évaluer et à rendre public leurs risques, dépendances et impacts sur le climat, la biodiversité et les ressources est désormais obligatoire. En ce sens les méthodologies et langages communs tels que la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) ou bien encore la Taskforce on Nature-related Financial Disclosure (TNFD) sont là pour les aider à s’emparer avec force de ces sujets et contribuer à relever les défis face à nous.

Sources :

1. COP27 Reaches Breakthrough Agreement on New “Loss and Damage” Fund for Vulnerable Countries
2. The Global Assessment Report on Biodiversity and Ecosystem Services
3. Fondation GoodPlanet
4. Convention on Biological diversity – Kunming-Montreal Global biodiversity framework, Montreal, Canada, 7-19 December 2022
5. Taskforce on Nature-related Financial Disclosures